
Disputant déjà sa 7ème saison consécutive en Ligue 2, le FC Sochaux-Montbéliard, qui affronte l’OL ce samedi en seizièmes de finale de la Coupe de France, n’a pas toujours été un banal club de seconde division française. De 2001 à 2007, sous la présidence de Jean-Claude Plessis, un déplacement au stade Bonal n’avait rien d’une formalité, et le club doubiste a même eu l’occasion de se frotter aux plus grands clubs d’Europe en Coupe de l’UEFA (Dortmund, Inter Milan). Le principal ingrédient de ce succès ? La formation maison. Frau, Pedretti, Monsoreau, Mathieu, Zaïri… Emmenée par Guy Lacombe, c’est une véritable génération dorée de joueurs formés au club qui sévit sur toutes les pelouses de Ligue 1 chaque week-end à l’époque.
Conscients de ce savoir-faire (le FCSM a notamment remporté les Coupes Gambardella 2007 et 2015), nombreux sont les mastodontes hexagonaux à s’être intéressés aux joueurs formés à Sochaux. L’OL a notamment vu passer Pierre-Alain Frau (deux ans), Benoît Pedretti (un an) et Sylvain Monsoreau (un an). Planète Lyon revient sur leurs expériences à l’OL, club où ils ne se sont pas imposés, mais au sein duquel ils ont beaucoup appris.
Pierre-Alain Frau (2004-2006)
1997-2004 : Sochaux
2004-2006 : OL
2005-2006 : RC Lens (prêt)
2006-2008 : PSG
2008-2011 : LOSC
2011-2012 : SM Caen
2012 : Al-Wakrah SC (Qatar)
2013-2014 : Sochaux
« J’ai vécu de très bonnes choses avec Sochaux mais je voulais évoluer dans un grand club ambitieux. Il était tant de partir pour moi car ici, à Lyon, il y a tout pour réussir et pour bien évoluer. C’est parfait ! Je suis vraiment heureux de pouvoir rejoindre cette équipe même si je sais qu’il va falloir s’accrocher pour faire ses preuves. » A peine arrivé à Lyon contre 8,5 M€ en juin 2004, Pierre-Alain Frau, qui a alors 24 ans, semble déborder d’ambitions. Il faut dire que le natif de Montbéliard était de plus en plus obsédé par l’idée de passer un cap, tant il a tout connu avec le club doubiste : les ascenseurs entre la D1 et la D2 de 1997 à 2001, l’installation pérenne du club en L1 à compter de 2002, et même la Coupe de l’UEFA de 2002 à 2004. Logiquement, PAF souhaite passer un palier et voir s’il est capable de s’imposer dans une équipe de niveau supérieur. Si Le Guen avait coché le nom de l’international espoir, c’est d’abord parce qu’il devait trouver un remplaçant à Peguy Luyindula, parti à l’OM. Pourtant, Frau n’arrive pas à Lyon en terrain conquis : il sait que la concurrence sera rude au sein du triple champion de France de l’époque. « Une équipe comme l’Olympique lyonnais ne peut pas avoir qu’un seul attaquant ! C’est la règle du jeu et c’est à moi de prouver que je peux m’imposer au sein de ce collectif déjà bien huilé. » Ce changement de dimension permet également au Montbéliardais d’obtenir une première convocation de Domenech en Equipe de France. Malheureusement pour lui, Frau ne pénètrera jamais sur une pelouse avec le maillot Bleu et ne dispose donc d’aucune sélection au compteur.
Pour sa première saison à l’OL, Frau jouit d’une belle confiance accordée par son entraîneur Paul Le Guen. Il dispute pas moins de 45 rencontres tcc pour 9 buts inscrits. L’un des plus mythiques reste celui inscrit à Gerland contre le Manchester United de Cristiano Ronaldo (2-2), sur un service de Sylvain Wiltord qui s’était permis de remonter le terrain en solitaire au préalable. Sur la scène nationale, l’OL va boucler cette saison 2004-2005 avec un quatrième titre de champion consécutif (12 points d’avance sur le dauphin lillois). Si cette première ligne majeure au sein de son palmarès le ravit, Pierre-Alain Frau sait aussi que l’OL de Le Guen arrive en fin de cycle. Le Breton quitte effectivement l’OL à l’été 2005, et l’ensemble des cartes sont rebattues avec l’arrivée de Gérard Houllier sur le banc lyonnais.
Dans le sillage de l’ancien coach de Liverpool, ce ne sont pas un mais deux attaquants qui rejoignent l’OL : John Carew, puis Fred débarquent. Naturellement, les médias se demandent ce que compte faire Houllier avec Frau. « Il n’en est pas question. Je compte énormément sur lui. » tranchait l’entraîneur rhodanien en août 2005 lorsqu’on lui demandait si PAF était susceptible de quitter l’OL. Pourtant, les faits vont légitimer les doutes médiatiques : lors de la première partie de sa deuxième saison lyonnaise, Frau ne dispute que 6 matchs et se retrouve régulièrement en réserve le week-end, disputant donc plus de matchs de CFA que de L1. Souhaitant continuer à progresser, le Montbéliardais fait le choix de s’exiler en prêt du côté de Lens, dès le mercato hivernal suivant. Cette transaction n’est pourtant pas une formalité, tant le président Aulas semble peu enclin à laisser partir un joueur n’ayant porté les couleurs de l’OL qu’une saison et demie. « Avec le président lensois (Gervais Martel), nous n’avons rien lâché et, à force de harceler M. Aulas (président de l’OL), nous sommes arrivés à nos fins. » déclarait PAF une fois son prêt officialisé. Lorsque Lensois et Lyonnais s’affrontent pour la 26ème journée, le président rhodanien n’imagine pas un seul instant voir le Racing mettre le joueur prêté sur la feuille de match… Pourtant, Frau est bien là. « Nous nous sommes accrochés après un match parce qu’il m’avait prêté Pierre-Alain Frau et il m’a reproché pendant toute la rencontre le fait qu’il joue : « Tu m’avais dit qu’il ne jouerait pas ! » J’ai dit : « On n’a rien signé et il joue. » On mène 1-0 et ils égalisent à la 93’. Jean-Michel a toujours eu beaucoup de chance contre Lens ! Cela s’est très mal passé quand on est sorti de la tribune. Ça continuait un peu à se « bousculer » dans l’ascenseur. Le lendemain, je me suis fait opérer des 2 hanches. Mon épouse m’a dit que nous avions reçu une bouteille de cognac de 1954. Ça venait de Jean-Michel Aulas ! » racontait Gervais Martel en 2018, au moment d’évoquer ses souvenirs de président du RC Lens dans l’émission l’Equipe du Soir. Ce prêt à Lens s’avèrera mitigé (6 buts) pour Frau. Il signe finalement au PSG, dès l’été suivant, contre 5 millions d’euros environ.
Benoît Pedretti (2005-2006)
1999-2004 : Sochaux
2004-2005 : OM
2005-2006 : OL
2006-2011 : Auxerre
2011-2013 : LOSC
2013-2015 : Ajaccio
2015-2018 : Nancy
A l’époque où Sochaux fourmillait de talents en devenir, tous les observateurs s’accordaient au moment d’identifier les éléments les plus prometteurs : Frau et Pedretti. A l’été 2004 donc, si l’OL arrive à convaincre Frau, le club rhodanien se heurte en revanche au refus de Benoît Pedretti (23 ans à l’époque), qui opte pour l’Olympique de Marseille (transfert évalué à 4,5 M€). « L’envie ! J’ai fait le choix du cœur. J’ai toujours été supporter de ce club. Gamin, j’étais fan du grand Marseille champion d’Europe. J’ai toujours eu envie de jouer dans cette équipe. » justifiait notamment le natif d’Audincourt (Doubs) dans les colonnes du Parisien juste après l’officialisation de ce transfert. Le journal francilien souligne d’ailleurs que beaucoup le voyaient signer à l’OL : « Oui, il y a même une agence de presse et une radio qui m’ont annoncé à l’OL. Lyon représente une logique, une continuité assez rare dans le football français. Mais ce matin, j’ai lu dans la presse que Le Guen avait un milieu de terrain en trop, que ce n’était pas vraiment dans ce secteur que Lyon avait une forte envie de recruter. J’ai un peu de mal à comprendre ça. »
C’est donc avec le maillot de son club de cœur sur les épaules que Pedretti entame la saison 2004/2005. Mais rien ne va se passer comme prévu : l’OM, qui terminera ce championnat à la 5ème place, voit deux entraîneurs (Anigo puis Troussier) se succéder sur son banc et l’ancien Sochalien affiche des performances inégales : « Il y a aussi le fait que quand Anigo était entraîneur, en début de saison, j’avais été moyen, puis j’ai été meilleur avec Philippe Troussier. » déclarait l’international aux 22 sélections dans un live Instagram avec Raphaël Chader. Dans la foulée de cette fin de saison plus réussie, Pedretti se voit bien poursuivre sa progression à Marseille… Mais tout le monde ne l’entend pas de cette oreille. « Comme je l’ai dit à l’époque, à la fin de la première saison, j’avais envie de continuer avec Marseille, de grandir en même temps que cette équipe. Après il y a eu des facteurs internes qui ont fait que je suis parti. Lyon a été le premier à faire une proposition, et on m’a dit ” Marseille accepte la proposition, il faut que tu partes ! ” À partir du moment où on n’avait pas trop envie que je reste, et je ne sais toujours pas trop pourquoi d’ailleurs, je ne pouvais qu’accepter la proposition de l’OL qui allait me faire découvrir la Ligue des Champions…» déclarait-il sur le site www.footmarseille.com. Pedretti refuse fermement l’étiquette de mercenaire qu’on cherche à lui coller : son départ vers l’OL n’est pas de son fait.
En réalité, ce sont surtout les dirigeants marseillais qui flairent la bonne affaire : vendant Pedretti à l’OL pour environ 8 M€, Marseille préfère se contenter d’une plus-value de 3,5 M€ immédiate plutôt que de prendre le risque de voir la valeur de son milieu de terrain décliner. Tant pis si cela passe par le fait de renforcer un rival.
A l’été 2005, Benoît Pedretti signe donc à l’OL dans le sillage de Gérard Houllier et se retrouve confronté à une concurrence galactique pour occuper l’un des trois postes de l’entrejeu lyonnais : Mahamadou Diarra, Juninho et Tiago sont programmés pour débuter la plupart des matchs. Lyon vit alors l’apogée de son histoire et les places au sein du onze n’ont jamais été aussi chères. Souvent remplaçant, le Doubiste dispute malgré tout 30 matchs sous les couleurs de l’OL. Il inscrit deux buts, dont un au cours d’un derby (4-0) à Gerland, resté dans les annales car les joueurs lyonnais, assurés du titre, s’étaient présentés sur la pelouse maquillés : « Lorsqu’on a joué à domicile contre Saint-Etienne et qu’on gagne 4-0, j’ai la chance de marquer le dernier but ce jour-là. C’était un grand moment, on venait d’être champion et c’était la fête. Malgré mon peu de temps de jeu cette saison-là, j’ai eu la chance de rentrer et de marquer dans un derby. » nous répondait Pedretti en 2019, lorsque nous lui demandions de raconter son meilleur souvenir à l’OL.
Ayant besoin de jouer pour reprendre une progression entravée depuis deux ans par ses échecs marseillais et lyonnais, Pedretti choisit finalement de filer à Auxerre dès la saison suivante. Si sportivement son passage à l’OL est mitigé, le joueur formé à Sochaux ne regrette en rien son choix de l’époque, comme il l’expliquait à l’Equipe en juin 2020 : « Je ne regrette aucun choix de carrière, même d’être allé à Lyon. Si je n’ai pas réussi à m’imposer là-bas, c’est simplement parce qu’il y avait plus fort que moi, le club faisait alors partie du “top 8” européen. Cette expérience m’a quand même permis de devenir champion de France. Et j’ai su rebondir derrière, c’est le plus important. »
Sylvain Monsoreau (2005-2006)
1999-2005 : Sochaux
2005-2006 : OL
2006-2008 : Monaco
2008-2012 : ASSE
2012-2013 : Troyes
2014 : Atlético de Kolkata (Inde)
Quatre jours après l’arrivée de Pedretti, c’est un autre joueur estampillé “formé à Sochaux” qui rejoint l’OL : Sylvain Monsoreau, qui a alors 24 ans, signe à Lyon pour 4 ans (transfert estimé à 5M€). Également convoité par le Werder de Brême, le natif de Saint-Cyr-l’École (Yvelines) voit en l’OL la dernière marche à franchir avant de s’expatrier : « C’est l’endroit idéal pour continuer ma progression. J’ai encore un palier à franchir avant d’éventuellement partir à l’étranger. »
Pouvant officier comme défenseur central mais aussi comme latéral gauche, Gérard Houllier fait de Monsoreau la doublure d’Eric Abidal sur le côté gauche de la défense lyonnaise. Si cette première saison lui permet de découvrir la Ligue des Champions, le vainqueur de la Coupe de la Ligue 2004 avec Sochaux se contente de bouts de matchs avec Lyon (25 tcc). Et lors du mercato hivernal 2006, alors que Houllier cherche à renforcer sa charnière centrale, ce n’est pas un replacement de Monsoreau qu’il envisage. Après avoir sondé le monégasque Sébastien Squillaci, l’entraîneur rhodanien se rabat sur Patrick Müller, qui a notamment l’avantage de très bien connaître la maison pour y avoir déjà fait un premier passage (2000-2004). Sylvain Monsoreau voit alors son avenir lyonnais s’assombrir, tant Abidal semble disposer de longueurs d’avance sur son côté gauche.
Si l’ancien Sochalien ne devait retenir qu’un souvenir de son passage à l’OL, il citerait très certainement le sacre de champion de France, officialisé dans un hôtel à Paris alors que les Gones patientaient en vue d’un match face au PSG programmé le lendemain. « Je ne sais pas si c’était la meilleure mise au vert de ma carrière, mais c’est sûr que c’est quelque chose qui n’est pas courant. Personnellement, ça reste mon seul titre de champion, un moment privilégié que certains ne vivent jamais. » racontait Monsoreau sur le site internet du magazine So Foot en avril 2014. « C’était cool. Un grand moment. Au bout de quelques minutes, je me souviens qu’on est sortis dehors pour communier notre joie dans la rue. On arrêtait les voitures torse nu. Les passants étaient un peu surpris, mais ils nous ont rapidement reconnus et ils se sont pris au jeu. On n’était pas en terrain hostile, les gens ont trouvé ça sympa, ils klaxonnaient, c’était quelque chose de festif qui n’a pas posé de soucis. Mais c’est resté respectueux, on n’a pas traversé tout Paris non plus, on est restés dans la rue de l’hôtel… ». L’Olympique lyonnais est alors sacrée pour la cinquième fois consécutive, avec 84 points et 15 unités d’avance sur le vice-champion Bordeaux.
L’été suivant, l’OL réactive la piste Squillaci. Pour convaincre Monaco de lâcher son international, les Lyonnais proposent d’inclure Monsoreau dans la transaction. Fin juin 2006, celle-ci est confirmée par les deux clubs : contre 3 M€ + Sylvain Monsoreau, Sébastien Squillaci rejoint l’OL pour 4 saisons.
Si le passage du défenseur formé à Sochaux reste mitigé d’un point de vue statistique, le Martiniquais n’a jamais considéré son passage à l’OL comme un échec : « Je n’en retiens que du positif, j’ai pris beaucoup de plaisir à jouer avec de très bons joueurs, l’équipe était très performante cette année-là et l’ambiance était à la hauteur des résultats. Cela restera pour moi un très bon souvenir. J’ai plus évolué sur le côté gauche à Lyon pour remplacer Eric Abidal qui était blessé pour une longue durée, donc je n’ai pas pu démontrer mes qualités dans l’axe sur la durée. Mais avec Cris, Caçapa ou Patrick Müller, il y avait beaucoup de qualités dans l’axe, et leurs performances étaient indiscutables. Il était très difficile de s’imposer dans le Lyon de l’époque, qui possédait déjà une ossature très solide et de très bons joueurs dans toutes les lignes. Il aurait peut-être fallu rester plus de temps pour avoir plus de chances de réussir, mais cela restera une expérience très enrichissante ».
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